lundi 27 décembre 2021

Fonction publique : laïcité, neutralité

Le statut de la fonction publique est l’objet d’attaques incessantes dictées par la remise en cause fondamentale de l’action de l’Etat par les néo-libéraux. Pourtant ce statut,  qui a prouvé son efficacité y compris en terme de gestion des ressources humaines,  préserve de surcroît la neutralité de services publics comme il nous garantit, en droit, des excès des prosélytes divers et variés. En tout cas il demeure un moyen pertinent de préserver le principe de laïcité.

 Anicet Le Pors, ministre communiste du gouvernement Mauroy sous la présidence de Mitterrand, est à l’origine de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires: « le fonctionnaire est tenu à l’obligation de neutralité » (art25). Cette obligation s’opère « dans l’exercice des fonctions ». Dans la vie privée le fonctionnaire ne peut se prévaloir de ses fonctions pour défendre ses croyances ou ses opinions.

Neutralité…

Le « devoir de stricte neutralité » inhérente à la fonction publique, est indissociable de celle du service public lequel doit être neutre dans ses effets et son exercice.

Il importe que l’usager des services publics ne soit pas en mesure de déceler aucune appartenance politique, religieuse, politique ou syndicale dans le comportement de l’agent public. La notion d’agent public est indifférente à une quelconque condition statutaire, il peut donc notamment s’agir d’un fonctionnaire titulaire comme d’un agent sous contrat. Ce qu’on nomme le devoir de réserve du fonctionnaire est l’effet principalement de la jurisprudence, il ne saurait faire obstacle à la liberté d’expression : l’article 6 de la loi de juillet 1983 entend ainsi favoriser l’émancipation d’un « fonctionnaire citoyen », expression chère à Anicet Le Pors, en lieu et place d’un fonctionnaire sujet. On mesure (ou pas) la tension qui potentiellement existe entre les exigences de la liberté d’opinion et l’obligation ardente de contenir celle-ci aux limites de la neutralité du service.

…laïcité

La loi dispose clairement que l’agent « exerce ses fonctions dans le respect du principe de laïcité. » A ce titre il s’abstient de manifester ou d’exprimer, dans l’exercice de ses fonctions, ses opinions religieuses. Ce même article dispose que le fonctionnaire « traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité ». Il est à noter que le texte dans son ensemble paraît hésiter entre la notion d’agent public et celle de fonctionnaire, mais c’est parce que le statut de la fonction publique est sensible aux soubresauts des réformes imposées par les gouvernements successifs. L’esprit du texte ainsi que la jurisprudence retiennent et insistent sur la notion d’agent public, qu’il soit fonctionnaire ou agent contractuel de droit public.

…au cœur même de la fonction publique

Le principe s’applique même lorsque l’agent public n’a pas de relation directe avec le public. On pourra l’interpréter comme la volonté d’inscrire la laïcité au cœur même de la fonction publique. La liberté d’opinion ou d’expression en son principe ne doit pas porter atteinte au fonctionnement régulier et à la continuité du service public. En revanche tout agent est libre de ses opinions ou croyances et peut même à ce titre bénéficier d’autorisations d’absence sous réserve des besoins du service évalués par la hiérarchie.

L’article 3 de la loi du 24 août dernier prévoit en outre (et de façon nébuleuse dans l’attente de décrets d’application) que le fonctionnaire doit être formé au principe de laïcité. De même la loi prévoit-elle désormais qu’il sera désigné au sein des services un « référent laïcité » auquel tout fonctionnaire, et tout responsable hiérarchique, pourra s’adresser pour tout conseil relatif au respect du principe de laïcité. La loi du 24 aout 2021 ajoute que le référent est chargé de l’organisation le 9 décembre de chaque année d’une journée de la laïcité. 

La loi du 13 juillet 1983 (Anicet Le Pors) n’a pas fait l’objet à ce titre d’une modification fondamentale, elle assure toujours que l’obligation de neutralité n’emporte pas que le fonctionnaire soit incriminé ou inquiété en raison de ses croyances ou de ses opinions. De même celles-ci ne devront en aucun cas figurer dans son dossier individuel ou, en amont, ne pas faire obstacle à un recrutement dans l’administration.

Pour qui veut défendre la laïcité, la fonction publique doit être la forteresse qui  se dresse contre tous les fanatismes quels qu’ils soient. Qu’elle soit le rempart contre les fantasmes et les  discriminations qui seraient, selon l’idéologie en vogue, dirigés en ce moment singulier de notre histoire contre telle ou telle partie de la population.

« La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes, sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public. » (article 1er de la loi de 1905) 

JMG

samedi 11 décembre 2021

Unité à gauche pour combattre et battre les idées de la droite extrême

 Pécresse gagne les primaires LR. Mais elle devra tenir compte de Ciotti qui a obtenu 39% des voix des adhérents. En interrogeant les programmes des deux finalistes nous devons en tirer un enseignement : la droite se renforce dans notre pays et devient de plus en plus extrême et rétrograde, emmenant avec elle une bonne part de l’électorat dans un délire qui reprend, entre autre expression de la haine anti-sociale, les termes rances de la xénophobie.

Ciotti n’hésite pas à développer un programme anti social inégalé comme par exemple de remplacer la dégressivité de l’impôt sur le revenu par une « flat tax » au taux unique de 15%. Comme si les inégalités n’étaient pas déjà assez fortes dans notre pays ! Il entend aussi réduire de façon drastique, voire faire disparaître, les cotisations sociales pour les salaires de moins de 3000 euros. Ainsi se dessine la perspective de l’étranglement financier de la protection sociale.

Pécresse n’est pas en reste même si en la matière cela paraît un peu moins violent. Sous le couvert de vouloir augmenter les salaires à hauteur de 10%, pour une dépense évaluée, on ne sait comment, à vingt milliards d’euros, elle prévoit la suppression de 200 000 postes de fonctionnaires ralliant ainsi une vieille surenchère de la droite.  Cette mesure cache à peine ce que la droite à terme continue de vouloir faire : réduire et fragiliser l’ensemble de la fonction publique de manière à faciliter et ouvrir le chemin des privatisations.

En matière d’immigration, les deux candidats se lâchent emportés sans doute par la dynamique Zemmour. Pour la droite la confusion va bon train entre immigration et islamisme. L’amalgame sert très naturellement leurs enjeux politiques et électoraux. Pécresse veut renforcer le contrôle des regroupements familiaux et limiter l’AME (Aide médicale d’Etat) aux seuls cas d’urgence. Elle préconise de considérer comme « majeur » tout mineur non accompagné qui refuse des tests osseux. Pécresse présidente, le droit du sol ne serait plus automatique.

Ciotti, adepte du « grand remplacement », veut aller encore plus loin, il propose sitôt parvenu aux affaires un référendum en souhaitant instaurer le droit du sang et abolir le droit du sol. Il préconise également la sortie de l’espace Schengen. Dans sa « lutte contre l’islamisme » Ciotti veut interdire le voile islamique pour les accompagnants scolaires, dans les services publics et dans les universités notamment…

Pas grand-chose sur l’écologie : sauf que Pécresse comme Ciotti veulent construire six EPR et d’instaurer une taxe carbone aux frontières de l’Union Européenne.

Enfin sur la sécurité, les deux premiers de la classe LR, rivalisent d’imagination avec un accessit particulier pour Ciotti qui  veut créer 39 000 places supplémentaires de prison et rétablir les peines plancher. Il souhaite créer un « Guantanamo » français pour lutter contre le terrorisme, et supprimer les allocations familiales aux parents dont les enfants « ne respectent pas les lois de la république ».

Quant à Pécresse, elle entend instaurer des circonstances aggravantes pour les délits commis dans certains territoires dits « quartiers de reconquête républicaine » (alors même que la mesure serait contraire à la constitution).

Au total il s’agit là de programmes qui fomentent la haine et aggravent la fracture sociale,  alors que le pays doit au contraire se retrouver autour de valeurs pacifiées et progressistes. Il est temps que la gauche retrouve son unité, à construire à la base comme au sommet, pour imposer les valeurs qui sont les siennes, et ne pas se retrouver étranglée par un débat droite-droite mortifère.