mardi 28 juin 2022

L’audiovisuel public toujours sous la menace

Pas d’illusion sur les volontés de notre président de la République de réduire les impôts et les taxes, cela cache l’essentiel. Ainsi la fin annoncée de la redevance de télévision pourrait bien signifier en réalité la mort programmée de la « radio-télévision » publique. Enfermé dans son armure idéologique, et à l’instar de l’ensemble de la droite qui se fait le pourfendeur de « la dépense publique », Macron entend mettre fin à la redevance audiovisuelle pour en faire tout autant un outil politique : cette « réforme » ferait partie des mesures censées accroitre le pouvoir d’achat des Français. Ceux-ci seront-ils assez éclairés pour débusquer la tromperie ?

Rappelons que « la contribution à l’audio-visuel public », comme elle se nomme officiellement, finance France Télévision (laquelle comprend France 2, France 3, France 4, France 5, Arte), Radio-France, Réseau France Outre-Mer, Radio France Internationale et enfin l’Institut National de l’audiovisuel. Le paiement de cette redevance se fait en même temps que la taxe d’habitation. Elle a pour inconvénient de n’être pas progressive. En 2021 elle se montait à 138 euros pour la France-métropolitaine (88 euros pour l’outre-mer). A titre de comparaison elle s’élève à plus de 300 euros en Autriche et en Suisse, 220 en Allemagne, 181 en Grande Bretagne. On pourrait dire que de ce point de vue notre pays est à la traine.

Vingt-trois millions de foyers français payent cette taxe audiovisuelle qui rapporte par an un peu plus de trois milliards d’euros. Si les propos de campagne de Macron se traduisent dans les faits il faudra bien compenser cette perte, d’une manière ou d’une autre, au besoin en taillant drastiquement dans les dépenses.

Qu’on en soit conscient ou non, il est clair que le pouvoir macroniste, qui veut se faire l’écho des marchands, se donne donc pour mission d’ébranler les fondements même de l’audiovisuel public. Ce dernier tient encore, mais pour combien de temps, sur des recettes dédiées et non pas, comme l’ensemble de ses concurrents privés, sur les recettes publicitaires ou pire sur les capitaux d’un patronat puissant qui a compris que l’information ( BFM, CNews pour ne citer qu’elles) constituait la clé essentielle pour nourrir de l’ombre un pouvoir politique prédestiné.

Ainsi donc durant ce deuxième quinquennat s’avance la menace d’une privatisation pure et simple de France 2, ou encore la fusion de France 3 et France bleu, avec pour corollaire, « économie » oblige, la suppression de dizaines de postes. La menace est réelle, elle est dans les cartons du pouvoir depuis fort longtemps, et E. Macron entend bien pour son dernier mandat en être l’artisan.

Depuis de nombreuses années déjà les programmations de France 2 en matière d’information se calquent sur celles de TF1 comme pour préparer l’audience à une information aseptisée au point d’ailleurs de n’être plus une véritable information mais plutôt une suite de magazines tenant le public à l’écart d’une vie citoyenne digne de ce nom.

La fin de la redevance signifie que l’audiovisuel public n’aura plus de financement stable mais se trouvera à la merci des votes d’un budget général annuel inévitablement erratiques, soumis aux jeux politiciens, faisant obstacle à des programmations pluriannuelles tenant sur la durée. L’indépendance de France Télévision mais aussi le respect du public seront abîmés par des choix éditoriaux contraires au pluralisme démocratique. C’est déjà vrai, demain ce sera pire.

On le voit aussi et depuis longtemps sur France Culture ou France Inter notamment où la parole de plus en plus souvent tient de la même pensée unique. Le discours de certains éditorialistes ne souffre pas de contradiction sauf en de rares fois comme autant d’alibis nous laissant présumer que le pluralisme des idées, en matière économique notamment, est sauf.

Par ailleurs, stimulée par la perte d’autonomie ainsi imposée à l’audiovisuel public, la mainmise des plateformes numériques mondialisées menace la diffusion des évènements culturels ou sportifs.

La fin de la redevance, pourrait signifier l’accélération de la découpe des évènements sportifs au profit des boîtes privés telles que Amazon Prime Video, RMC, Canal plus…Jeu de dupes : au total les charges seront un peu moins lourdes pour le contribuable mais le téléspectateur lui devra payer davantage s’il veut profiter des rencontres sportives, dont les plus emblématiques comme le tournoi de Roland Garros ou bien encore le tour de France dont les droits de diffusion télévisée pourraient être retirés de France Télévisions pour être éclatés entre plusieurs opérateurs privés.

Qui en sortira gagnant ? Certainement pas le téléspectateur ou l’auditeur de radio. Sur le plan culturel, la perte de l’indépendance et de la stabilité auront également des conséquences en matière de rayonnement de notre pays au profit d’une culture « mainstream » stimulée par des enjeux financiers énormes.

Pas étonnant que les pressions politiques se fassent de plus en plus fortes pour enfin arriver à la suppression de cette recette dédiée qui présente malgré tout une condition nécessaire à une certaine indépendance éditoriale.

En 2013 l’Allemagne a instituée la contribution forfaitaire universelle qui est payée par l’ensemble de la population. Il s’agit d’une contribution obligatoire indépendamment de l’usage de la prestation alors qu’en France il s’agit d’une redevance liée au service.

Les organisations syndicales, vent debout contre le projet gouvernemental de la suppression radicale de la redevance s’ajoutant aux coupes budgétaires déjà subies par le secteur public, seraient favorables à l’instauration de cette contribution forfaitaire sur le modèle allemand. Le principe a pour avantage en effet de donner plus de stabilité encore au financement de l’audiovisuel public. C’est ce même système qui a été adoptée par l’Italie (mais avec une part beaucoup importante des ressources publicitaires ce qui évidemment pose d’autres problèmes en matière d’indépendance).

L’intersyndicale de France Télévision demande l’indexation de cette contribution sur l’inflation « assortie d’un plan pluriannuel d’évolution sur 5 ans via un contrat d’objectif et de moyens ». Ces syndicats demandent également que le gouvernement définissent des orientations stratégiques de manière à investir efficacement le numérique pour ne pas l’abandonner exclusivement au secteur privé.

La remise en cause de la redevance tient à la fois de la question économique comme de la question idéologique. Un audiovisuel public suffisamment fort est une chance pour la démocratie, ne pas prendre les mesures pour le protéger et lui donner les moyens financiers et administratifs suffisants conduit à une perte de richesse culturelle inestimable.

Notre identité est aussi la résultante d’une information politique ou culturelle libres produite par des medias qui doivent rester, autant qu’il est possible, notre propriété collective.



JMG



mercredi 8 juin 2022

Police

En Seine-st-Denis fin mars, à Paris au Pont-neuf fin avril, et enfin samedi dernier à Paris dans le 18éme arrondissement, en tout quatre morts, en trois mois seulement, pour des refus d’obtempérer ! Cela commence à faire beaucoup. La police ne tue pas ?

Il faut juste s'atteler à mieux la former et lui rappeler qu’on n’est pas aux Etats-Unis, qu’il doit exister en France une police républicaine à qui on donne les moyens de fonctionner et reste sous contrôle des citoyens au travers de politiques responsables, notamment en matière sociale et sécuritaire.

La légitimité de la violence d’Etat ne doit pas permettre n’importe quoi dans l’exercice du maintien de l’ordre. Cette question ne saurait demeurer tabou, quitte à se faire traiter d’islamo-gauchiste ou d'on ne sait quoi par des gens qui s'entendent à tuer tout débat indispensable en la matière.

La violence et le nombre des attaques contre Mélenchon, qui a le courage de lancer le débat  sur les mauvaises pratiques de la police, sont nerveuses et excessives, souvent haineuses. Elles présentent aussi le risque, relayées par des media à visage unique, de porter atteinte gravement à la bonne santé démocratique de notre pays.

JMG