vendredi 30 novembre 2012

Des raisons du déclin industriel en France

Depuis mars 1983 les salaires ne sont plus indexés sur les prix ou les gains de productivité. C'est une des raisons pour lesquelles la part des salaires dans la valeur ajoutée a baissé de 10 points de 83 à 87.
La protection sociale est financée par les salaires lesquels sont soumis à des cotisations sociales (cotisations patronales comprises).
Ces dernières n'ont cessé de baisser au travers les exonérations nombreuses dont ont bénéficié les entreprises. Cela explique en grande partie le déficit de la sécurité sociale dont on voudrait la mort. Ainsi 40% de la protection sociale seulement est prise en charge aujourd'hui par les entreprises contre 60% dans les années 80.
Le résultat en terme de commerce extérieur ne s'est pas pour autant amélioré puisque le déficit aujourd'hui se monte à 70 milliards.

Les entreprises au total bénéficient de 150 milliards d'exonérations fiscales ou sociales. Et donc non, globalement, on ne peut pas dire qu'elles sont étranglées. Par contre leurs profits eux ont très sensiblement augmenté. Ainsi en dix ans, la part des dividendes dans la valeur ajoutée créée par le travail a été multiplié par deux.

La question reste de savoir pourquoi est apparu le déclin industriel que nous connaissons, et qui fait son oeuvre de destruction sociale.
Il faut dire d'abord, comme le souligne Gabriel Colletis* que les grands goupes ont privilégié leurs investissements hors de nos frontières au détriment de la production effectuée en France.
Ainsi les entreprises du CAC 40 consacrent 20 à 25 % de leur investissements à la France, et 75 à 85 % à l'étranger ce qui se traduit en terme d'emplois : deux millions de salariés en France contre quatre millions à l'étranger. Il faut savoir que les groupes allemands eux investissent deux fois moins à l'étranger.
Pour prendre ( ou ne pas prendre)  en comparaison le modèle allemand, la production d'automobiles chez nos voisins a considérablement augmenté en volume et valeur sur leur territoire.
En France au contraire, la balance commerciale de l'automobile est désormais déficitaire. Ainsi Renault fabrique la majeure partie de ses autos à l'étranger entraînant par la même la disparition de tous ses sous-traitants.

Le tissu industriel en Allemagne est plus solide car les sous-traitants sont davantage respectés, et les donneurs d'ordre sont plus regardants qu'en France sur la qualité des produits, davantage en tout cas que sur les prix. D'où des coût industriels plus forts qu'en France, ce qui n'entraîne d'ailleurs pas une moindre compétitivité !

Enfin, en matière d'impôt, on fiscalise autant et de la même manière les bénéfices réinvestis et ceux qui sont distribués aux actionnaires.

Ajoutons, et c'est même l'essentiel, que la désindustrialisation est due aussi à une moindre activité générale liée à une baisse de la demande partout en Europe : en cause bien sûr les politiques d'austérité pratiquées aujourd'hui à l'échelle du continent.

JMG

* A lire Gabriel Colletis " Urgence Industrielle " Editions le bord de l'eau .

mardi 27 novembre 2012

La Grèce victime de l'Europe libérale et des banquiers

Je reproduis ainsi intégralement un texte de Gérard Filoche au sujet de la Grèce laquelle en Europe fait figure aujourd'hui de terrain d'essai, avant que d'autres pays, pour leur malheur social et économique, soient bientôt concernés eux aussi:

" Ils se sont tout permis pour étrangler le peuple grec !

Après avoir infligé 11 plans d’austérité, une véritable destruction sociale, au peuple grec,  après l’avoir forcé à brader ses entreprises publiques, ruiné sa production, aggravé sa dette odieuse, liquidé ses droits sociaux, à l’éducation, à la santé, salaires et retraites, la troïka UE/BCE/FMI a  joué, mardi 27 novembre 2012, à relâcher la pression.
C’est un peu comme un chat jouant avec la souris qu’il a capturé et qui est à sa merci. C’est un peu comme les barbares des temps lointains, envahissant un pays,  brulant les maisons, violant les femmes,  détruisant les trésors puis rendant des terres aux vaincus pour qu’ils produisent à nouveau de quoi alimenter les occupants.
La politique d’austérité infligée par l’UE depuis 2009 sous prétexte de la « rembourser », a provoqué une telle récession qu’elle a porté la dette grecque de 100 points du PIB à 170 points du PIB !
 Cette dette odieuse provoquée par l’oligarchie grecque
-  qui avait soutenu la dictature des Colonels de 1967 à 1974,
-  qui avait acheté un énorme et vain armement à Thyssen Krupp,
-  qui avait dispensé armateurs et popes de payer des impôts,
-  qui avait ruiné le pays avec les Jeux Olympiques de 2004,
-  qui avait confié à Goldman Sachs le soin de truquer les comptes,
cette dette odieuse, chacun savait qu’elle ne serait et ne devait jamais être payée !
Pourtant les banques européennes et mondiales s’en sont servi à mort, prenant dessus des taux d’intérêts à 7, 8 , 12 et même 17 %.  Et la BCE, le FMI, l’UE Merkel se sont comportés comme des rapaces, exigeant non pas de l’oligarchie mais du peuple qu’il soit saigné pour le compte de ces banques privées usuraires.
 Ceux de la troïka qui ont infligé des mesures cruelles, cette immense souffrance au peuple grec pour le compte des banques privées devraient être arrêtés et jugés devant un tribunal pénal international pour crimes économiques. Quand on sait que la BCE a prêté 1000 milliards aux banques européennes privées en 2012 au taux de 1 %, et qu’elle a laissé ces mêmes banques imposer des taux de 7, 8 ou 12 % à la Grèce, le crime est signé ! Tout cela au nom d’une étrange et rituelle orthodoxie monétaire, d’une stupide « règle d’or » dont les seuls bénéficiaires sont les spéculateurs, les usuriers, les banques privées qui exercent ainsi une dictature contre les états, les républiques et les citoyens.
Ce mardi 27 novembre, la troïka a encore discuté 14 h de la façon dont elle pouvait tirer le maximum de marrons du feu qu’elle alimente en Grèce.
Elle a débloqué 44 milliards d’aide qui n’avaient pas été donnés depuis l’été. Car il faut savoir que toutes les « annonces d’aides à la Grèce » dont les journaux européens sont quotidiennement remplies ne sont que du « pipo ». Ce serait une grave erreur de croire que l’UE « aide » la Grèce. La Grèce ne reçoit rien. Pas un euro. C’est aux banques privées créditrices de la Grèce que ces fameuses « tranches d’aide » sont données ! Et du point de vue « communication », elles sont données plusieurs fois, d’abord dans votre poste de radio, ou votre journal quotidien et bien plus tard, sur les comptes des banques prêteuses à taux usuraire.
Ainsi, les 17 pays de l’euro et le FMI de Christine Lagarde, ont fini cette nuit du 27 novembre par autoriser le déboursement à partir du 13 décembre de trois tranches de crédits suspendues depuis l’été et qui permettent au trésor grec d’éviter la banqueroute. L’enveloppe d’aide en retard atteint 44 milliards, dont 10 milliards que le conseil du FMI devra lui-même débloquer à son tour. Soyez surs qu’on vous en fera encore plusieurs fois l’annonce !
Hors de la vue du peuple, Lagarde et Draghi ont allégé cette dette artificielle infligée à la Grèce et alors que tout le monde le sait depuis le début, elle ne pourra jamais la payer. La dette devra être ramenée à 124 % du PIB en 2020 (au lieu de 100 % en 2009). Elément nouveau : ils promettent de la réduire encore, « à moins de 10 % », en 2022. C’est un scénario de remise de dette en bonne et due forme. Comme l’écrit Le Figaro « Ils ont aussi balisé sur 10 ans le retour du pays vers davantage de stabilité financière. » Ils ont même réduit de 1 point le taux d’intérêt accordé à la Grèce par les créanciers publics. Ils rallongent les échéances de ces prêts de 15 à 30 ans, c’est-à-dire au-delà de 2040. Ils reportent de dix ans le paiement des intérêts au fonds de sauvetage FESF. Dès 2013, la BCE et les banques centrales nationales rétrocéderont  11 milliards de profits ( !) réalisés sur les obligations grecques. L’Euro groupe autorise enfin Athènes à racheter ses propres titres, avec une décote probable de plus de 60 %. Tout cela sachant que la Grèce doit encore théoriquement 240 milliards dont 80 milliards au privé et le reste au public, FESF et a la BCE.
Pourquoi maintenant et pourquoi si tard ?  Parce que la Grèce est exsangue. Il n’y a plus grand chose à en tirer. Le FMI considère que « les grecs sont arrivés au bout des efforts qu’ils sont capable de faire ». Impossible de les piller davantage. Et la peur que le sort  infligé aux Grecs a produit en Europe, a joué tous ses effets, en Italie, en Espagne, au Portugal qui se sacrifient à leur tour cruellement pour des taux de 6 à 7 %… … Le FMI poussait même à un abandon immédiat de créances publiques (pas privées). Les trésors européens et le ministre allemand Wolfgang Schäuble s’y opposaient  férocement puis ont cédé dans la nuit. Pour Jean-Claude Juncker, le Fonds est désormais « complétement revenu à bord ». Mario Drag hi a annoncé « un retour de la confiance envers la Grèce et l’Europe ». Selon Christine Lagarde : « la Grèce est à nouveau sur la voie d’une dette viable ».
«L’accord de cette nuit met fin à une trop longue incertitude, lâche le commissaire à l’euro Olli Rehn avant d’avouer clairement : « la Grèce avait fini par s’imposer comme un test de crédibilité et d’aptitude à prendre des décisions ».
Cette dernière phrase est la plus limpide : il s’agissait d’un vulgaire « test match ». Est ce que la troïka était capable de faire plier ce bouc émissaire, oui ou non ? Est ce que la dictature de la finance l’emportait, oui ou non ? Est ce que l’Europe entière peut être menacée et soumise à ce régime ? Est ce que « les marchés » rapaces toujours insatisfaits, après réflexion, ne vont pas juger que cela est prématuré, coûte « trop cher », tire sur le FESF, et revenir à la charge ? "

Démocratie et Socialisme ( Gérard Filoche)

lundi 26 novembre 2012

Etre jeune n'est pas un argument politique

Une réunion de la section de Lons-le-Saunier un soir de novembre : le jeune secrétaire de section s'est félicité de sa victoire, son mandat de secrétaire étant renouvelé. Le premier fédéral, presque aussi jeune, qui fait également partie de la section de Lons-le-Saunier a vu lui aussi le renouvellement de son propre mandat à la tête de la fédération. Ils ont exprimé tout deux leur satisfaction de voir des jeunes à la tête des instances du parti socialiste local, voulant donner ainsi une espèce de leçon à ceux qui auraient alerté sur la tentation d'un  jeunisme excessif.

Quelques bémols cependant : ils ont été élus sans qu'aucun candidat ne se soit présenté face à eux ce qui n'est jamais bon signe pour la vie démocratique d'un parti comme le nôtre qui a une culture du débat.
La précipitation dans laquelle s'est déroulé le dernier congrès n'a pas permis de discussion politique digne de ce nom préalable au vote des instances dirigeantes du parti.

Décevante donc, conservatrice même, pas très "jeune" en définitive, cette posture qui consiste à systématiquement soutenir les décisions du gouvernement, sans chercher à rester une force de proposition ou à relayer les préoccupations de la population qui sont nombreuses.

Plus sérieux encore, voire plus inquiétant :  le mot "adaptation" a bien été prononcé par ces "jeunes", ainsi que le terme de "réorientation" dont le parti ne pourrait se passer. Certes, il est bon de s'adapter mais qu'est-ce que cela signifie ? Ce terme justifierait-il les 20 milliards en  niches fiscales offerts aux entreprises, mais sans contrôle ni contrepartie, et tout cela au nom de la compétitivité ? Cela signifie-t'-il l'approbation d'une politique de l'offre, ou encore de la réhabilitation d'une fiscalité indirecte au travers l'augmentation de la TVA qu'il n'y a pas si longtemps le parti lui-même dans son ensemble dénonçait ?

Décevant de la part de "jeunes" dont le seul souci, sous prétexte que la gauche est au pouvoir, serait de gérer une crise qui pèse sur les salariés, et le peuple tout entier sans penser un instant remettre en cause le système qui permet cela. La place des jeunes n'est-elle pas plutôt, avant de penser à une hypothétique carrière politique, de défendre pied à pied les avancées sociales promus ou décidés en leur temps par le parti lui-même, ou leurs aînés ? Ou d'en imaginer de nouvelles...

Le parti socialiste n'est pas un parti de godillots, on peut très bien soutenir loyalement un gouvernement qu'on a porté au pouvoir sans pour autant lui donner un blanc-seing.
 
JMG



http://www.maintenantlagauche.com

lundi 19 novembre 2012

Le puits sans fond

Qui a dit que les entreprises européennes, globalement, étaient en difficulté ? Une immense niche fiscale leur est pourtant offerte aujourd'hui en France alors que rien ne dit que cette manne financière servira à l'investissement, à l'innovation ou à la recherche. Les exonérations sociales ou fiscales dont elles ont jusqu'à présent bénéficié auraient plutôt servi au rachat d'actions ou à la distribution de dividendes ou, comme on le voit ici, à la simple thésaurisation. Les 20 milliards, ou plus, du "pacte de compétitivité" servent-ils vraiment l'intérêt général ?

JMG

vendredi 16 novembre 2012

Dépense publique contre gaspillage privé

C'est devenu à la mode, tout le monde crie haro, et l’on sait à peu près d’où cela vient, sur les dépenses publiques comme si celles-ci étaient la cause de tous nos problèmes. Et pour se défendre de cette prétendue menace, tous les moyens sont bons, jusqu’à tailler en pièces, ou continuer de le faire, des services publics qui sont pourtant le salut de la population, et en particulier de la plus défavorisée. Ainsi continue-t-on aujourd’hui de mettre en œuvre une des pièces maîtresses de la politique des précédents gouvernements, la RGPP, révision générale des politiques publiques, (excepté quand même, et c’est heureux, pour ce qui concerne l’éducation et l’enseignement.)
Il est temps d’arrêter le matraquage idéologique, relayé par la classe politique bien pensante avac l'aide d'une presse aveugle, paresseuse ou complaisante.
Il faut rappeler que les dépenses publiques ont un effet multiplicateur sur l’activité économique, et on serait bien bêtes de s'en priver, ce que font pourtant les tenants de la vulgate libérale.  Plus grave encore : le virus a même atteint le gouvernement et le Président de la République qui ont pris le funeste engagement de réduire de 10 % les fameuses dépenses publiques. Mais quels ministères, quels secteurs en seront victimes ? On ne sait pas encore.
Les investissements pratiqués par les collectivités, que l’on voudrait pourtant juguler en les accusant de gaspillage, entraînent des créations d’emplois dans le privé. Et c’est d’autant plus vrai à notre époque où le secteur privé, fort pourtant de marges qui se sont globalement accrues, rechigne à investir alors qu’il n’hésite pas à verser aux actionnaires des dividendes de plus en plus importants sans effets de valeur ajoutée. Et donc plutôt que vociférer, comme l’ensemble des media à longueur de journée «  mort à la dépense publique », il faudrait bien plutôt, au travers une fiscalité plus juste et plus économique, faire passer enfin ce message en direction des plus riches, qui le sont de plus en plus : «  halte, au nom de l’intérêt public, aux gaspillages privés. »

JMG