samedi 29 octobre 2016

Béziers, j'ai pris l'oseille et je me suis tiré

Il y a bien longtemps que je ne m'étais pas rendu à Béziers, ville que je connais à peine dans laquelle pourtant mon grand-père maternel avait tenu, il y a longtemps, une petite librairie. Je ne sais même pas où elle se trouvait exactement, je n'ai pas pris le temps de retrouver la trace qu'elle aurait pu laisser.
En arrivant de l'autoroute, la cathédrale Saint-Nazaire vous domine et vous lance un défi, celui de la rejoindre tout en haut. Nous sommes passés, en montant, par un quartier où les immeubles m'ont paru inhabités, comme désœuvrés, en mal de ravalement ou de restauration.
Le miraculeux, le valeureux, l'efficace maire d'extrême-droite, Robert Ménard, n'est peut-être pas encore passé par là.

On se surprendrait à penser que c'est en raison de son élection que ces immeubles font autant la gueule. Puis on se dit -de façon plus objective- que c'est le contraire, c'est parce que tout cela est moche, abandonné, qu'une petite majorité de la population biterroise en âge et en désir encore d'aller voter, a pu le choisir comme maire, croyant ainsi crier mieux sa révolte, ou bien exprimer une haine ordinaire, haine contre soi-même ou contre un hypothétique étranger d'où viendraient les ennuis d'une ville en perdition.

Une ville abîmée, comme beaucoup en France, où le centre-ville est déserté par les commerces, où les rues sont désertes, tristes, désespérément vides, ennuyeuses, et dans laquelle les sans domicile fixe, par désespoir, ont élu domicile, faute de mieux et de moyens, ville où on ne passerait son temps qu'à survivre.
Bonjour l'ambiance, parce que le temps aussi était au gris ou à la tempête, en ce jour d'octobre où Météo France avait eu la fâcheuse idée d'en rajouter en décrétant une alerte orange en prévision de ce qui, finalement,  ne se traduisit que par quelques coups, bien sentis c'est vrai, de tramontane.

Il n'y a pas qu'à Béziers que la grande distribution, puis le chômage généralisé qui touche l'espoir et l'avenir des forces vives d'une nation, a pu faire des ravages. L'extrême-droite, on le sait, prospère sur la misère qu'on entretient depuis des années à coup de "réformes" qui font la part belle à la déréglementation, et d'une manière générale, à l'abandon des politiques publiques. Pas qu'à Béziers donc ! En matière de relégation urbaine la crise n'a pas fini de faire des émules.

Le lendemain, un dimanche, à côté des halles, j'ai voulu prendre de l'argent liquide, il y avait devant le distributeur, une vielle dame qui pouvait à loisir se sentir en sécurité. Et pour cause, un groupe de quatre policiers municipaux qui m'ont paru armés jusqu'aux dents, de vrais Robocops, plus genre forces spéciales que police de proximité, encerclaient deux jeunes qui visiblement avaient peine à s'expliquer pour on ne sait quelle faute. Il n'avaient rien de criminels, ils s'exprimaient bien, bien habillés, ce n'étaient pas des miséreux à qui l'on aurait pu reprocher de traîner dans les rues.
L'un des deux disait : "je suis très déçu de ce qui m'arrive, je suis Français, je suis désolé de voir ça, c'est exagéré". Le gars était Français, à Béziers, et il a cru bon de le préciser. Étonnant non ?

Je me suis retourné pour tenter de mieux comprendre, et là je suis tombé sur le regard de celui qui vraisemblablement était le chef du groupe des policiers municipaux, regard insistant, comme si moi aussi je devais être en faute, il m'a fixé pour m'obliger à détourner les yeux au bout de longues secondes. Comme collègue de la fonction publique territoriale, me suis-je dit, il y a mieux, le gars m'avait à l'œil, littéralement.

J'ai donc pris l'oseille, et je me suis tiré, sans demander mon reste, pas rassuré. Je n'ai pas eu la témérité de questionner de quoi ces jeunes pouvaient être coupables. Je ne pense pas qu'ils venaient de dévaliser la bijouterie d'en face, de vandaliser l'Eglise de la Madeleine juste à côté ou d'attaquer la vielle dame qui était à l'instant devant moi au distributeur automatique. Etre jeune à Béziers, apparemment ça craint, c'est le sentiment que cela m'a laissé.
Quand même, ça donne pas envie d'y retourner, même pour y retrouver les traces d'une librairie perdue.

JMG




dimanche 9 octobre 2016

La droite n'est jamais partie, elle revient quand même

La catastrophe idéologique du parti socialiste, que ses responsables à Solférino ont bien voulue, se sera donc traduite par des lois anti-sociales ou contre-productives comme la loi travail par exemple, ou le "pacte responsabilité" qui coûte cher au budget de l'Etat sans résultat positif sur l'emploi. Cela conduira-t-il au délabrement général de la gauche ?

La responsabilité de ces dirigeants en tout cas est immense, historique. Il y a encore un espoir peut-être que la gauche se redresse avant la date cruciale des présidentielles. Mais pour l'heure on voit se dessiner plutôt un renforcement du camp des droitistes purs et durs dont certains se voient déjà à l'Elysée, Juppé, Sarkozy, Le Maire, Fillon...auxquels, outre Le Pen bien sûr, on pourrait ajouter Macron comme étant, si on a bien compris, ni de droite, ni de gauche, et donc plutôt au centre-droit.
 On peut espérer seulement qu'ils fassent comme Hollande, qu'ils ne respectent pas leur promesses et qu'au contraire, comme lui, élection faite, s'attaquent à des réformes qui aillent contre leur propre camp.

Je n'en crois rien bien sûr, ces candidats entendent conduire une politique qui aggravera la situation de millions de Français, ceux là même que les débats sur les primaires, par lassitude, par dégoût, indiffèrent au plus haut point.
C'est que pour une bonne partie de la population l'urgence n'est pas ou n'est plus là. Une bonne partie s'abstiendra et, ce faisant, fera le jeu des plus conservateurs.

Car dans l'électorat de droite, il est à parier que l'abstention ne saura pas aussi forte, la droite sera davantage pressée d'en découdre et de se débarrasser de Hollande de la même façon qu'en 2012 le peuple de gauche, mobilisé, avait décidé de se débarrasser avant tout de Sarkozy.

Dès lors, pour mieux se démarquer de la "gauche", il n'est pas étonnant que les prétendants de la droite ou du centre fassent de la surenchère et se risquent à l'absurde.
Ainsi Juppé entend bien continuer l'oeuvre néo-libérale, si besoin en l'aggravant, de Sarko ou de Hollande en réduisant encore les "charges" des entreprises ce qui ne fera en définitive que réduire encore davantage la part des salaires dans le PIB, au profit d'une spéculation financière qui tue l'économie réelle.
Ainsi encore, Juppé, qui passe pourtant pour un modéré, veut-il reculer la retraite à 65 ans comme si cette vieille recette, rance, allait miraculeusement relancer la croissance et réduire le chômage, celui des jeunes en particulier ! On marche sur la tête !

On passe sur la suppression de l'ISF, ou la hausse d'un point de la TVA de nature à appauvrir les plus pauvres, ou le plafonnement des aides sociales...On retiendra surtout, tout un symbole, la sacro-sainte suppression des 35 heures : Jospin enfin assassiné lui aussi, qui n'était pourtant pas un révolutionnaire !

Et tout ça dans quel but, pour quel horizon indépassable ? Réduire les dépenses publiques jusqu'à 100 milliards d'économies en cinq ans ! A côté, Hollande avec ses 40 milliards dépensés sans contre-partie au titre du CICE, passera pour un gauchiste ou un modéré, ce que ses thuriféraires ne manqueront d'ailleurs pas de souligner. Ils comptent bien là-dessus, ces naïfs, pour faire passer leur candidat, dans le style " vous n'avez pas le choix, avec la droite ce sera pire" ce en quoi ils n'ont pas tort, le pire étant toujours possible en effet.

Juppé entend dans son programme nous libérer du code du travail, d'assouplir notamment le travail du dimanche ou en soirée. C'est la direction nationale de la CFDT qui va être contente, la loi El Khomry aura fait ses petits.

Je ne parle pas du programme de Fillon qui va plus loin encore dans l'hystérie néo-libérale, ou celui de Le Maire qui veut supprimer le statut de la fonction publique territoriale comme si, pour combattre le chômage, il suffisait d'élargir la précarité et de supprimer des acteurs essentiels des services publics.

L'heure est grave. La gauche ne gagnera cette présidentielle qu'unie, elle n'en prend pas pour l'instant le chemin. La première étape serait que Hollande, compte tenu de son bilan, ne se représente pas, et le dise enfin.
Même ça ce n'est pas gagné.

JMG