samedi 26 avril 2014

La face cachée d'une réforme

La disparition programmée des Départements posent des questions essentielles qui ne sont pas forcément celles que l’on croit. Observons d’abord qu'il y a loin de la coupe aux lèvres puisque le  Premier Ministre, dans sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale, fixait une date d’effet pour 2021. D’ici là on peut penser que beaucoup de ministres, premiers ou pas, auront déjà coulé sous les yeux du peuple français, y compris Manuel Valls, à moins que celui-ci ne devienne Président de la République, ce dont personnellement je doute.

Pour l’heure, j'espère encore en un simple un effet d’annonce : il est politiquement correct, aujourd'hui encore, hélas, de montrer que le gouvernement fait quelque chose contre « le mille-feuille administratif » devenu depuis quelques années le nec plus ultra du projet politique en France. Faute de grives on mange des merles, on peut cacher l’inaction ou la paresse politiques par des projets douteux dont on sait qu'ils seront relayés par les media, ne serait-ce que par le vacarme polémique qu’ils pourront susciter. Et ça marche !
C’est le genre de sujet sensible comme le fut en 1969 celui, politiquement monumental à l’image de son initiateur Charles de Gaulle, de la disparition du Sénat. A partir du moment où cela concerne des élus, on peut être sûr en effet qu’il y aura du tangage. Car les élus en général ne font pas partie de la majorité silencieuse, ils font même du bruit, y compris avec des casseroles.

La question que pose ce projet est celle, en réalité, de l’avenir de services publics de proximité et du respect que l’on porte à leurs usagers. Les départements oeuvrent en premier lieu pour les routes, les collèges, les services sociaux…et bien d’autres domaines encore au nom de la clause générale de compétence que notre premier ministre s’attache à vouloir faire aussi disparaître. Ce n’est pas en tuant l’institution qu’on fera disparaître le bien fondé, comme la nécessité, de ces compétences.
Toute les velléités aujourd’hui des réformes de l’organisation administrative de la France s’envisage en termes d’économie de finances publiques et non en terme d’efficacité des services publics, ce qui ajoute à la confusion qu’on prétend vouloir combattre.
Attaquer l’institution c’est vouloir faire de l’austérité sans le dire en pensant que cela passera mieux dans les consciences, c’est sous-entendre qu’on dépense trop avant de couper dans le vif.
Le problème de fond est bel et bien l’avenir des services publics et non celui de l’institution qui n’en est que l’outil. Le problème de fond c’est bien l’austérité, ce sont bien les onze à douze milliards d’euros dont les usagers ou citoyens des collectivités dans leur ensemble devront faire le deuil dans leur vie quotidienne.

La deuxième question est de nature démocratique. Voulant imiter l’Allemagne parce que son mille-feuille, de par son Histoire, serait moins épais et moins crémeux que le nôtre, on voudrait supprimer les strates territoriales en oubliant de considérer qu’elles sont aussi, d’abord, la manifestation de la démocratie locale. Ainsi veut-on aussi supprimer la commune, au profit notamment des métropoles,  sans voir que la commune est la base, en France, de l’engagement citoyen, du plus petit village à la grande ville qui sont historiquement des lieux de solidarité et de débat démocratique. Ainsi veut-on aussi supprimer désormais les départements. Le citoyen a la tête qui tourne, il n’y comprend plus rien, le remède est devenu bien pire que le mal. Mais c'est parce que nous n'avons pas affaire à un remède, mais bien plutôt à un alibi.

Défendons plutôt les services publics en ne faisant pas porter aux collectivités le poids d’une crise que l’Etat central ne veut plus assumer. Tout ça parce qu’il a décidé de remettre son destin à une Europe dont le peuple a déjà refusé l‘actuelle orientation. Mais c’est encore une autre affaire.

JMG

vendredi 18 avril 2014

Salaires et discrimination syndicale

La journée du sept avril dernier était celle du combat pour l’égalité salariale. Elle concernait l’égalité entre les hommes et les femmes bien sûr, mais en principe devait également faire réfléchir sur l'ensemble des discriminations en matière salariale .

Thomas Breda, un doctorant de l’école d’économie de Paris, établissait dans une étude que les délégués syndicaux étaient payés en moyenne 10% de moins que l’ensemble des autres salariés. En moyenne, et pour être plus précis, l’écart serait de 8 à 11% inférieur, à âge égal, à expérience égale, à diplôme égal, et à sexe égal.

 Cette étude est déjà un peu ancienne car elle date de 2010 mais la pression auquel est soumis de plus en plus le monde du travail n’a pas dû arranger les choses depuis quatre ans. Les employeurs, loin de vouloir acheter la paix sociale, comme on le pense communément, pratiqueraient bien plutôt une discrimination envers les syndicalistes.
 On pourrait objecter que ces écarts de salaires puissent venir de ce que ces délégués syndicaux seraient moins bons ou moins productifs dans leur travail. Le chercheur a au contraire observé que ces écarts de salaires s’enregistrent cinq années après le début des mandats détenus par ces délégués. Ces discriminations se font principalement par le biais de refus de promotion ou d’augmentation de salaires.

A tout seigneur tout honneur : le syndicat le plus touché serait la CGT, ses délégués percevraient en moyenne 20% de salaire en moins, la discrimination dans la discrimination en somme. Gage d'efficacité militante, ou bien sa conséquence ? Ensuite viennent la CFDT (10% de salaire en moins) puis Force Ouvrière dont les délégués, toujours en moyenne bien sûr,  ne perdraient rien...
En tout cas Il serait temps que cette discrimination anti-syndicale cesse car il en va là de la santé de la démocratie sociale, à une époque où la classe politique ne trouve plus crédit, à tort ou à raison, aux yeux des citoyens.
Cette réalité discriminatoire montre, s'il en était besoin, qu'en France, bien loin même d'une social-démocratie à l'allemande, les syndicats ne sont pas considérés, ni reconnus à leur juste place alors que leur action demeure essentielle dans les rapports sociaux.
Elle montre surtout que dans notre pays le combat syndical reste rude et difficile, ce qui explique, au moins en partie, le faible taux de syndicalisation. 

Enfin, ou pouvait espérer qu'un pouvoir de gauche fasse davantage pour la dé-criminalisation de l'action syndicale. Pour l'instant il n'en est rien. A-t-il au moins conscience qu'il en va de sa propre survie ?

JMG