dimanche 19 avril 2020

Le peuple brièvement, pour parler d'autre chose

(D'abord permettons pour une fois qu'on ne parle pas de coronavirus ou d'autre malheur inattendu ou surprenant.)

Le peuple, si on voulait en risquer une définition, bien imparfaite au demeurant, est à la fois objet et instrument du pouvoir.
On peut, en s'arrogeant le droit d'être son porte-parole, et c'est le but de tout politique, lui faire dire ce qu'on l'on veut, et il y a donc en lui de la passivité. Il subit le plus souvent, et ce faisant peut devenir tout à la fois acteur, victime ou bourreau.

Affirmer ou souhaiter que le peuple se soulève commande de suite d'indiquer quel peuple précisément se soulève, au nom de quoi, pour quels desseins ; en somme de quel peuple il s'agit.

C'est qu'il ne faut jamais prendre le peuple pour n'importe qui.

Il est moral, et donc nécessaire, de tenter de dire quel est ce peuple, celui dont on voudrait qu'il fasse l'Histoire, et pas n'importe laquelle. Le peuple mérite toujours d'être précisé. Ou, mieux encore, mérite qu'on lui laisse lui-même le soin de se préciser, en liberté. Mais l'occasion est rare. L'Histoire (ou le Pouvoir) à cet égard se sont toujours montré réticents à lui lâcher la bride.

C'est pourquoi l'expression "peuple de gauche" me va bien. Même si c'est à gauche, et par sa gauche, en son sein, qu'il fut le plus douloureusement trahi.
Malgré tout, le nommer ainsi est déjà la tentative salvatrice de le distinguer des démons qui sont en lui, même si c'est au prix d'une réduction désespérante.

Momentanée et illusoire réduction sans doute, mais qui indique déjà l'exigence d'une pensée politique. Pensée de gauche en l'occurrence, définie ou envisagée par l'Histoire, pensée rassembleuse, et même pensée de combat.
Une pensée qui prend le parti de défendre le monde du travail, en cela qu'il est la véritable richesse des nations, plutôt que celui du patrimoine.

Dire "peuple de gauche" c'est commencer de penser, c'est le début d'une dispute indispensable au progrès et à la transformation sociale.
En somme parlant du peuple, je comprends mal qu'on s'interdise à le nommer ou à le qualifier vraiment. C'est une grande responsabilité, au sens d'une obligation, que de donner le nom du chemin qu'on aimerait qu'il prenne. 


JMG





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