lundi 12 octobre 2020

Vertige sécuritaire

 Depuis au moins trois décennies, après Pasqua, Chirac, Sarkozy, Valls, et durant Macron, Castaner, et plus récemment Darmanin pour raisons d'immédiateté électorale, ce qu'on doit nommer encore la droite, dont le macronisme, continue de plus belle de jouer sur la peur des Français pour s'accaparer ou conserver son pouvoir électoral et politique.

Le thème de la sécurité à cet égard est toujours aussi prometteur car les arguments délivrés, pour être le plus souvent fallacieux, n'en sont pas moins efficaces. L'insécurité publique, ou l'appréhension ou l'angoisse qu'elle suscite, ne serait-ce qu'en la suggérant et en la prenant comme outil politicien, est au centre des préoccupations de tout individu qui se respecte. Un brin d'agitation des peurs peut conduire à la déraison. Depuis quarante ans la délinquance n'a pas augmenté et pourtant le sentiment d'insécurité, alimenté par des politiques qui soufflent sur les braises, est plus fort que jamais.

Il se trouve que ceux qui convoquent l'insécurité à des fins électoralistes sont ceux qui précisément, comme Sarkozy en son temps au nom de la révision générale des politiques publiques, ont diminué les moyens de la police nationale en amputant ses effectifs d'au moins 10 000 équivalent temps plein. 

Mais même en pleine contradiction politicienne, les arguments pour un sécuritarisme outrancier sont d'autant plus crédibles qu'ils se fondent sur du vrai et perçus tragiquement comme une remise en cause de l'intégrité individuelle. La peur, qu'elle soit nourrie du réel ou de l'imaginaire, est mauvaise conseillère surtout lorsqu'elle est instrumentalisée par des gens qui s'accrochent au pouvoir sans mesure et hors de tout sens de l'intérêt général, faisant passer le leur bien avant.

Ainsi contribue-t-on à distiller dans la société une peur, diffuse mais réelle, qui pousse le sentiment d'insécurité dans une augmentation sans fin sans pour autant faciliter des solutions pérennes.

N'en déplaise aux va-t'en guerre civile, l'insécurité est (aussi et d'abord) une donnée subjective. Or, en ce domaine comme en d'autres, on ne peut être efficace si on ne fait pas l'effort de l'objectivation. Oui, contrairement à ce que prétend cette droite conservatrice qui inonde de ses propos démagogiques et primaires la plupart des plateaux télé, il convient de faire l'effort, non pas d'excuser bien sûr, mais d'expliquer et de "déconstruire" les phénomènes d'insécurité et de délinquance pour en connaître les raisons profondes. Expliquer pour s'éviter des solutions hâtives sans efficacité, faute de quoi notre société civile sera toujours condamnée à subir. 

Suite à des événements de délinquance cet été, des municipalités nouvellement élues, comme celle de Lons-le-Saunier par exemple, glissent sur la peau de banane sécuritaire dans des solutions trop immédiates pour etre bien pensées. La nouvelle municipalité divers gauche de Lons-le-Saunier décide, alors qu'il n'existait pas jusqu'ici de police municipale, d'en créer une. On soulignera le paradoxe de cette innovation : la gauche succède à une droite qui depuis trente ans avait fait le choix de ne pas en créer, se limitant jusqu'ici à une équipe d'agents de surveillance de la voie publique. 

La création de quatre postes de policiers municipaux, dans un contexte de pénurie financière imposée par les gouvernements successifs, ne manquera pas de grever un budget qui aurait pu servir à d'autres causes. 

A tout prendre, dans une question fermée, entre une police et un musée, j'aurais choisi ce dernier et rappelé à l'Etat ses responsabilités en matière de police. La création de polices municipales risque d'ailleurs d'encourager l'Etat à ne pas prendre des responsabilités qui sont les siennes. Ce transfert de charges est tout bénéfice pour l'Etat central.

Il conviendrait que l'Etat, et ce gouvernement plus précisément, travaille à restaurer la confiance de la population dans sa police nationale en lui donnant les moyens de fonctionner pour la paix civile, (tout en se gardant d'en faire, comme ce fut trop le cas ces dernières années, un outil de répression des libertés publiques.)

JMG





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