mercredi 26 avril 2017

Prise de tête dans le rideau de l'isoloir

Je vais faire mon psy, une fois n’est pas coutume, je vais lâcher prise comme ils disent les psys tendance bouddhiste, je vais vous dire pour vous apaiser que votre vote, quel qu’il soit, à moins que vous soyez un Macron de la première heure (il n’y a donc pas longtemps) ou une Marine butée, votre vote sera nul. Il ne servira à rien, il ne fera barrage ni à Macron ni à Le Pen, et donc détendez-vous.

Il n’est plus le temps où on pouvait voter Chirac pour faire la nique au père de la ci-devant, c’est fini ça. En 2002, j’étais dans les manifs contre le père de la ci-devant, j’ai pu mesurer le nombre, la détermination, la sincérité, des gens qui se sont persuadés qu’il fallait voter Chirac pour, selon l’expression mille fois répétée, « faire barrage à l’extrême-droite ». Bon d’accord on n’a pas eu Le Pen, mais on s’est payé Raffarin, ce n’était pas (beaucoup) mieux. On a eu la réforme des retraites quelques semaines après, avec en prime la trahison du syndicat dit réformiste le plus en vue de la droite et des libéraux, la CFDT. En gros on a eu le beurre et l’argent du beurre.

Le Pen a dû faire à l’époque au second tour moins de vingt pour cent. On avait gagné ! Aujourd’hui on voudrait, « pour faire barrage à Le Pen », nous faire voter Macron. On nous prendrait pour des cons que ça m’étonnerait pas, en plus ça rime, comme si c’était fait exprès. Comme si il ne suffisait pas de ne pas voter Le Pen pour lui faire barrage. Pour faire barrage à Le Pen, réellement, il aurait fallu y penser avant. Maintenant c’est un peu tard.

Par exemple il aurait ne pas faire voter la loi Macron. Idem pour la loi El Khomry. Je ne vois pas pourquoi il faudrait faire barrage à Le Pen tout en disculpant Valls, El Khomry, Macron qui se seront révélés comme de véritables fossoyeurs de l’espoir même de la rénovation sociale. Faire barrage à Le Pen présupposerait d’abord de ne pas faire barrage à la gauche. Or c’est ce qu’ont fait les gouvernements Hollande qui se sont succédé, et tous ceux qui sans vergogne ont trahi Hamon, le pauvre Hamon qui a trouvé plus frondeur que lui, lui qui en fait n’a jamais été un frondeur. Il n’a fait que critiquer Valls, et en plus sur le tard, ce n’est pas fronder ça, c’était seulement faire  preuve de bon sens : lorsque on est de gauche on évite de faire trop de lois que la droite n’aurait jamais osé faire.

On est bien d’accord il existe un risque Le Pen, cette présidentielle est bien celle de tous les impossibles. Tout peut arriver même le pire. Mais le pire n’est-il pas déjà là, en embuscade ? Qui aurait dit qu’on aurait un tel embarras de non-choix ? Qui aurait pensé que l’offre politique fût à ce point pauvre et fermée ?

Car existe aussi le risque Macron. Lui qui fait venir à lui tous les opportunistes dont certains ont montré déjà de quoi ils étaient (in)capables, lui qui est sur le point de s’en prendre de plus belle à l’Etat Social avec une violence que nous soupçonnons mal et dont il a pourtant donné un aperçu pendant les quelques mois qu’il est resté au gouvernement Valls-Hollande. Ces derniers d’ailleurs, incarnation de la deuxième droite, ne sont-ils pas, eux qui jouent aujourd’hui les vierges effarouchées, co-responsables de l’avènement inquiétant de l’extrême-droite ?

Et donc je ne dirai rien de ce que j’ai décidé, déjà pour la bonne raison que je n’ai pas encore décidé. Compte tenu de l’histoire récente j’estime avoir le droit de considérer que le mai de 2002 n’a rien à voir avec le mai de cette année. Un peu comme Méluche, je n'ai pas le cœur à me prononcer. Réflexion.
Je sais, c’est décevant.

JMG



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