samedi 8 février 2014

Le serpent qui mord la queue de la poule qui fait l’œuf


Les entreprises du BTP du Jura, par la voix de leur fédération, tirent la sonnette d’alarme. (Le Progrès de Lyon du 5 février). Elles n’en peuvent plus. Leur activités seraient mises à mal par « une fiscalité étouffante » et un « environnement réglementaire devenu insupportable ». Ce syndicat professionnel demandait même davantage de contrôle pour combattre le travail au noir, facteur s'il en est de concurrence déloyale.

On l’oublie souvent mais ces entreprises en effet, et c’est vrai au delà du secteur du bâtiment et des travaux publics, sont les premières victimes de la « crise », et plus elles sont petites, plus elles souffrent, plus elles sont sous-traitantes, plus elles sont maltraitées. Tout n’est pas rose pour ces petites entreprises, aussi bien pour les (souvent petits) patrons que pour les salariés.


Il y a cependant un peu de schizophrénie dans tout ça. La fédération du BTP reconnaît que seule la croissance peut permettre un retour de l’activité. Ou réciproquement, serait-on tenté d’ajouter. On peut tout autant affirmer, sans crainte de se tromper, que seule l’activité permet la croissance. Qui a fait l'oeuf, qui a fait la poule ? Ou est-ce encore le serpent, venimeux, qui se mordrait la queue ?

Le problème c’est qu’on ne peut raisonnablement accuser la fiscalité, sans d’ailleurs préciser de laquelle on veut parler, tout en appelant à la rescousse les pouvoirs publics même au travers de dépenses d’investissement. Investissements de nature publique donc : fort opportunément une photo illustrait cet article, on y voyait le chantier du siège de l’agglomération du Grand Dole, avec cette légende « les chantiers des collectivités sont le bienvenus ». Tu parles !

Mais qui dit dépenses publiques dit recettes publiques, et en ce domaine on a rien inventé de mieux que les impôts. Pourvu bien sûr qu’ils soient le plus justes possible.

Schizophrénie encore lorsque cette même fédération du bâtiment entend combattre la travail au noir en revendiquant des contrôles plus fréquents. Qui d'autre pour faire le job qu'une inspection du travail disposant de vrais moyens d'action ? Pourquoi alors continuer de tailler dans les effectifs de la fonction publique ? Y aurait trop de fonctionnaires, vraiment ?

Et puis, et puis, on ne peut appeler à des contrôles plus fréquents tout en dénonçant une réglementation plus contraignante.

Ceci dit, comme aurait dit De Gaulle, on les a compris les petits entrepreneurs du BTP !
C’est vrai que la fiscalité des entreprises est à revoir, malgré quelques avancées dans l’égalité de traitement contenues dans la loi de finances 2014. Il s’avère que les petites entreprises demeurent soumises à l’impôt plus douloureusement encore que les grandes. Sans compter que ces dernières, c’est bien connu, sont plus habiles à l’optimisation fiscale, pour ne pas dire à l’évasion paradisiaque.

Quant « aux charges étouffantes », la fédération du BTP pourrait se montrer plus juste. Je suppose que ces petits patrons évoquent-là les cotisations sociales qui rappelons-le sont destinées à financer la sécurité sociale dont tout le monde profite encore, y compris ces patrons qui confondent "charges" et cotisations sociales.

On note que la fédération semble se féliciter de la suppression des "charges" (encore!) de la branche famille. A sa place je me méfierais. Car si l’on veut la sauvegarder la branche famille, il faudra bien la financer : soit par l’impôt, soit par la raréfaction de la dépense publique, dépense publique qui entre autres choses fait marcher les entreprises du BTP.

Je vous avais dit que c’était une histoire de serpent qui se mord la queue.

Il y a des façons néanmoins de sortir de ce cercle vicieux, une autre politique est possible, en augmentant les bas salaires par exemple pour sauvegarder une demande intérieure agressée par l'austérité, ou en planifiant un vaste programme national de création de logements sociaux. On nous dit qu’il en manque.

Mais là est une autre histoire, celle des si...
Si les media écervelés cessaient de vilipender la dépense publique...si le SMIC pouvait être sensiblement augmenté pour relancer la consommation...

Si mémé ou le président en avaient...


JMG








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